La Présidente Gatti Santana informe le Conseil de sécurité de l’ONU de l’avancement des travaux du Mécanisme

La Présidente du Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux (le « Mécanisme »), la Juge Graciela Gatti Santana, a présenté aujourd’hui au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies (le « Conseil de sécurité ») à New York le vingt-sixième rapport sur l’état d’avancement des travaux du Mécanisme.
La Présidente Gatti Santana a commencé son allocution en évoquant la tenue prochaine de la 30e commémoration du génocide commis à Srebrenica en 1995, la décrivant comme un « événement d’une importance historique et morale ». Elle a souligné le rôle essentiel joué par les Tribunaux ad hoc qui ont établi dans des décisions judiciaires le génocide de Srebrenica et le génocide des Tutsis au Rwanda en 1994, des conclusions historiques qui ont depuis été confirmées par le Mécanisme.
Rappelant la vision du Conseil de sécurité voulant que le Mécanisme soit une structure économique et temporaire, la Présidente Gatti Santana a souligné l’attention, l’équité et l’efficacité continues dont le Mécanisme faisait preuve dans l’exécution de son mandat. Dans ce contexte, elle a rendu compte des activités judiciaires récentes, et notamment du règlement rapide de la procédure en révision concernant Gérard Ntakirutimana. Elle a fait observer que, au cours de la période considérée, les juges du Mécanisme avaient rendu plus de 100 décisions et ordonnances, dont la plupart avaient trait aux fonctions judiciaires continues telles que la modification de mesures de protection ordonnées en faveur de témoins.
La Présidente a également fourni des informations actualisées concernant l’exécution des peines et les questions d’outrage, soulignant que le Mécanisme avait exercé de manière restrictive sa compétence en matière d’outrage : deux affaires d’outrage récentes ont été renvoyées à des autorités nationales conformément au Statut et le renvoi d’une autre affaire est actuellement à l’examen.
S’agissant de la coopération des États, la Présidente Gatti Santana a insisté sur le fait que cette question « demeur[ait] essentielle non seulement pour les efforts entrepris par le Mécanisme en vue de réduire les coûts et de mener à bien ses fonctions principales, mais aussi pour le respect des principes humanitaires sur lesquels repose la justice pénale internationale ». Elle a particulièrement attiré l’attention sur le maintien de Félicien Kabuga en détention, dont le procès a été suspendu sine die en 2023, et elle a fait observer que l’absence d’un État qui soit disposé et qui convienne pour sa mise en liberté soulevait des préoccupations relatives aux garanties procédurales. Par ailleurs, tout en exprimant sa profonde reconnaissance aux États actuellement chargés de l’exécution des peines pour le soutien qu’ils apportent au Mécanisme, la Présidente a réaffirmé qu’il était urgent que d’autres États acceptent des responsabilités en matière d’exécution des peines. Elle a expliqué que cela permettrait de réduire l’empreinte opérationnelle du Mécanisme et de mettre fin à l’incertitude prolongée dans laquelle se trouvaient les condamnés qui attendaient leur transfert.
Pour souligner davantage l’importance cruciale de la coopération des États, la Présidente a identifié deux questions en suspens : la situation qui perdure des personnes acquittées ou libérées qui ont été réinstallées au Niger en décembre 2021, et le refus persistant de la Serbie d’exécuter les mandats d’arrêt qui ont été décernés contre Petar Jojić et Vjerica Radeta, en dépit de ses obligations légales et des signalements répétés de son manquement au Conseil de sécurité.
Se tournant vers l’avenir, la Présidente Gatti Santana a évoqué la résolution 2740 (2024), par laquelle le Secrétaire général est prié de présenter des rapports sur les possibilités de transfert de certaines fonctions du Mécanisme et sur les lieux envisagés pour le dépôt des archives. Elle a partagé son point de vue sur le transfert potentiel de la fonction de contrôle de l’exécution des peines, reconnaissant que des aspects administratifs spécifiques, tels que le contrôle des conditions de détention, pouvaient être délégués aux États. Cependant, elle a fortement mis en garde contre le transfert de la responsabilité de l’examen des demandes de grâce, de commutation de peine ou de libération anticipée des condamnés. Elle a averti que cela entraînerait une inégalité de traitement entre les plus de 40 condamnés du Mécanisme et « réduira[it] à néant des décennies de travail qui, jusqu’à présent, [avaie]nt permis de faire obstacle à l’impunité ».
La Présidente a fait observer que les fonctions judiciaires continues du Mécanisme concernaient des droits fondamentaux, garantissaient la protection des témoins et restaient essentielles pour veiller à l’intégrité de procédures internationales. Si des solutions viables, justes et équitables pour le transfert ou même la cessation de certaines fonctions peuvent être trouvées à mesure que les activités diminuent, il est préférable, alors que les activités judiciaires se poursuivent à un rythme soutenu, de conserver ces fonctions au niveau international tout en veillant à ce que l’intérêt de la justice soit protégé avant que de tels changements n’interviennent.
Pour conclure, la Présidente Gatti Santana a précisé que la 30e commémoration du génocide de Srebrenica prévue prochainement nous rappelait que « la justice n’[était] pas une activité limitée dans le temps, mais un engagement continu ». Elle a réaffirmé à cet égard que, en dépit des défis mondiaux actuels et des ressources limitées, le Mécanisme restait déterminé à s’acquitter de son mandat. Dans le même temps, elle a reconnu que des changements étaient nécessaires afin de veiller à ce que les contributions restantes du Mécanisme au cycle de la justice soient apportées à un coût que la communauté internationale pouvait assumer. Elle a conclu en disant : « Nous nous associerons […] à ce Conseil dans les efforts qu’il déploie pour préserver l’héritage des Tribunaux pour le Rwanda et pour l’ex-Yougoslavie au sein d’un Mécanisme dont les effectifs sont encore réduits, et, en définitive, au-delà de sa durée de vie opérationnelle. »